*J'aurais dû la fermer*

L'arrogance, la suffisance de la fugueuse te font immédiatement venir ces pensées, mais tu prends sur toi. Il faut la protéger, la tenir à l'abri de la police et des puissants, des corrompus de ce monde. Tu le dois à Peter, tu le dois à Elena, tu le dois… À toi-même.

La voilà, maintenant, qui fait travailler ses méninges, ce qui te tirerai presque un sourire alors que tu prends le temps de mieux la regarder. Elle a fugué, bien sûr, elle est au commissariat, certes, mais son apparence t'indique qu'elle réussit à ne pas trop mal s'en sortir. Toujours est-il qu'une ressortissante de Nouvelle Aubaine, encore sous son autorité même si elle ne le désire pas, a des démêlés avec la police et que tu en es témoin. Par conséquent, tu va l'aider, surtout qu'Elena a demandé à ce que tout le monde garde un œil sur Tara, mais cette dernière n'est pas obligée de le savoir.

— Pas forcément.

Tu la laisse mariner un moment, s'exclamer ou râler si besoin, avant de reprendre.

— Tu as quitté l'orphelinat. Donc, tu as refusé les avantages qui vont avec.

Nouveau silence de ta part, un léger sourire sadique aux lèvres.

*Désolée Elena, on ne se refait pas.*

Finalement, après avoir suffisamment profité de ton avantage, tu reprends.

— Tu veux être considérée adulte et autonome ? Je vais faire ça. Tu veux que je t'aide à sortir de là ? Soit.

Ton sourire s'élargit.

— Tu sera endettée envers moi. Un service pour un service. À prendre ou à laisser.

Bien évidemment, si un mot de cette offre, de ce chantage, arrive aux oreilles des autres, tu es sûre d'en prendre pour ton grade. Pire, Elena serait bien capable de t'interdire l'accès au bar.

Et ce, sans compter sur la réputation que tu te donnes ainsi.

Son regard, cette incrédulité dans son ton, sont des éléments jouissifs tant elle semblait si sûre de t’avoir eue, de t’avoir coincée dans ce qu’elle percevait comme des mensonges et des bluffs, alors que tu sors ton téléphone et lui prouve que, non, ce n’en était pas.

Ton outil en main, tu composes le numéro d’Elena, le sourire encore présent sur le coin de tes lèvres. L’appel commence, la connexion tente de se faire, alors que l’adolescente s’active pour t’empêcher de mener ton projet à bien. Ses exclamations doivent être entendues par ton amie, probablement, mais tu raccroches en la voyant se renfrogner. une fois cette action effectuée, toute trace de sourire disparaît de ton visage, le moment ne s’y prête plus après tout. L’autre étant sur le point de capituler, la situation redevient sérieuse.

Bien entendu, Tara avoue ne pas pouvoir lutter contre la situation que tu imposes. Bon, elle ne le fait pas dans ces termes exactement, mais avec bien plus de mauvaise volonté, cependant elle te concède tout de même la victoire de votre joute verbale, ce qui reste, en soit, le plus important.

— Bien. Tu vois qu’on peut s’entendre, quand chacun y met du sien.

Tu choisis délibérément de ne pas te formaliser de son attitude rebelle, hostile même. Cette enfant ne connaît pas les épreuves que la vie peut réserver, grâce à votre travail acharné avec la Fratrie.

Son regard et son attitude, sans même prendre en compte ses précédentes paroles, sont suffisamment équivoques pour que tu ne doutes aucunement de ses intentions. Si elle le pouvait, elle t’aurait déjà attaqué, à son plus grand désarroi. Un nouveau sourire s’immisce à la visualisation de cette scène.

— Maintenant, pour que je puisse te faire sortir rapidement, qu’est-ce qui t’a amené ici exactement ?

La possibilité est laissée volontairement, dans la formulation de cette question, de jouer sur les mots pour ne pas donner l’information attendue mais une complètement inutile. Il s’agit d’un petit test, pour savoir à quel point elle se laissera aider. D’un autre côté, tu te doutes que ce n’est pas quelque chose de si grave que ça, sinon le Capitaine ne t'aurait pas laissé la voir si facilement.